Comment démembrer ses parts de SCPI ? Étapes et stratégie
Le démembrement de propriété des parts de SCPI (Société Civile de Placement Immobilier) est une stratégie patrimoniale avancée. Il permet de séparer les attributs du droit de propriété - la jouissance et les revenus (usufruit) d'une part et la disposition du capital (nue-propriété) d'autre part. Cette technique est particulièrement puissante pour répondre à des objectifs d'optimisation fiscale, de préparation successorale ou de gestion de l'Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI). Démembrer ses parts implique une succession d'étapes juridiques et une compréhension fine des conséquences pour toutes les personnes impliquées. L'objectif n'est pas de vendre ses parts au démembrement, mais de les transmettre ou d'en céder les droits de manière réfléchie.
Comprendre les objectifs et les formes du démembrement de SCPI
Avant d'entamer toute démarche, il est essentiel de cerner la nature exacte de l'opération envisagée, car le démembrement peut prendre deux formes distinctes qui n'ont ni les mêmes finalités, ni les mêmes implications.
Définition : démembrement viager vs démembrement temporaire
La distinction entre les deux formes de démembrement est fondamentale, parce qu'elle détermine la durée de la séparation des parts de SCPI. Dans ce contexte, on trouve le démembrement viager et le démembrement temporaire.
Le démembrement viager
En optant pour le démembrement viager, la séparation des droits prend fin au décès de l'usufruitier. Il est principalement utilisé dans un cadre de transmission patrimoniale ou successorale. Typiquement, un parent (le donateur) se réserve l'usufruit (les revenus) et donne la nue-propriété à ses enfants. La durée de ce démembrement est ainsi incertaine, car elle est liée à l'espérance de vie de l'usufruitier.
Le démembrement temporaire
Avec cette stratégie, la séparation est fixée pour une durée précise à l'avance (par exemple, 5, 10 ou 15 ans). Il est privilégié pour des stratégies de gestion d'IFI ou pour l'investissement de trésorerie d'entreprise qui cherche des revenus à court ou moyen terme. Concernant sa durée, elle est fixée contractuellement dès l'origine.
Le choix entre ces deux formes doit découler de vos objectifs personnels : anticiper la succession ou optimiser la fiscalité immédiate.
Pourquoi démembrer ? Optimisation fiscale, successorale et IFI
Le démembrement de parts de SCPI est un outil aux multiples facettes, qui permet d'atteindre simultanément plusieurs objectifs patrimoniaux majeurs.
Optimisation successorale
En donnant la nue-propriété de vos parts (démembrement viager), vous transmettez votre patrimoine à vos héritiers à un coût fiscal réduit. Les droits de donation sont calculés uniquement sur la valeur de la nue-propriété (décotée par rapport à la pleine propriété en fonction de l'âge de l'usufruitier). Au moment du décès, la réunification de la pleine propriété se fait sans aucun droit de succession supplémentaire.
Optimisation fiscale (revenus)
Le démembrement temporaire permet à la personne qui détient l'usufruit (souvent une entreprise) de percevoir un flux de revenus maximisé et souvent optimisé par l'amortissement comptable (dans le cas d'une société à l'IS).
Gestion de l'IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière)
Voici les particularités de cette option :
- Dans le cadre d'une donation avec réserve d'usufruit (viager), seule la valeur de l'usufruit est intégrée dans l'assiette IFI de l'usufruitier.
- Dans le cas d'un démembrement temporaire résultant d'une cession à titre onéreux, l'usufruitier et le nu-propriétaire sont imposés chacun sur la valeur de leur droit respectif, permettant de réduire la base d'imposition globale.
Les étapes clés pour mettre en place le démembrement de ses parts de SCPI
Le processus de démembrement est encadré et nécessite une approche structurée, qui commence par une phase d'analyse et se termine par la détermination des modalités financières de l'opération.
L'analyse patrimoniale préalable et la consultation des statuts de la SCPI
La première étape indispensable avant de démembrer est de consulter les statuts de la SCPI. Vous devez vous assurer que la société de gestion autorise le démembrement, ce qui est le cas pour la grande majorité des SCPI. Et, si oui, connaître les conditions spécifiques qu'elle impose, notamment en matière de durée minimale ou maximale pour le démembrement temporaire.
Ensuite, il faut s'assurer que la personne qui reçoit l'usufruit est bien celle qui a besoin des revenus. Il est aussi impératif que celle qui reçoit la nue-propriété est en mesure d'attendre la réunification du capital, sans percevoir de revenus durant la durée du démembrement.
Enfin, l'analyse doit prendre en compte les Taux Marginaux d'Imposition (TMI) des personnes physiques impliquées ou le taux d'IS de l'entreprise usufruitière pour s'assurer que l'opération est réellement bénéfique après impôt.
Choix de la méthode : donation, succession ou cession des droits
La méthode utilisée pour démembrer les parts est déterminée par votre objectif principal (transmission vs investissement).
| Méthode | Objectif Principal | Nature du Démembrement | Conséquence Financière |
| Donation/Succession | Transmission du patrimoine | Viager (le plus souvent) | Le donateur ou le défunt se sépare d'une part de son capital |
| Cession (Vente) à Taux Nul | Cession de l'usufruit | Temporaire | Le cédant reçoit une somme d'argent (la valeur de l'usufruit) |
| Acquisition sélective | Investissement d'entreprise | Temporaire | L'entreprise achète l'usufruit à un nu-propriétaire existant |
La donation est la méthode la plus courante pour l'optimisation successorale. La cession est la méthode privilégiée pour les besoins d'investissement temporaire et de gestion de trésorerie.
La détermination de la clé de répartition et de la durée de l'usufruit
Une fois la méthode choisie, il faut valoriser les droits de chaque partie. Voici ce qu'il faut retenir :
- En cas de donation avec réserve d'usufruit, la valeur fiscale de l'usufruit et de la nue-propriété est déterminée par le barème légal de l'article 669 du Code Général des Impôts (CGI), basé sur l'âge de l'usufruitier.
- En cas de cession ou d'investissement d'entreprise, la clé de répartition est fixée de manière économique, en fonction de la durée convenue et du rendement prévisionnel de la SCPI. La société de gestion fournit généralement une grille de valorisation pour faciliter l'opération.
Déterminer la durée exacte du démembrement temporaire est vital. C'est elle qui fixe la valeur de l'usufruit et l'horizon de perception des revenus pour l'usufruitier.
Les formalités juridiques et administratives obligatoires
Qu'il s'agisse d'une donation ou d'une cession, des étapes juridiques formelles sont requises pour rendre le démembrement opposable à l'administration et à la société de gestion.
L'intervention du notaire et la nécessité de l'acte notarié (donation)
L'intervention d'un notaire est indispensable dans la plupart des cas.
Donation de nue-propriété
Toute donation de parts doit obligatoirement être constatée par un acte notarié (article 931 du Code Civil). Le notaire rédigera l'acte de donation, enregistrera la donation auprès de l'administration fiscale et calculera les droits de donation dus.
Cession (vente) de vroits
Bien que la cession de droits démembrés puisse théoriquement se faire par acte sous seing privé, l'intervention d'un notaire est fortement recommandée pour sécuriser l'opération, notamment pour valider la clé de répartition et garantir la transmission des parts à la société de gestion.
La notification à la société de gestion et l'enregistrement des droits démembrés
L'acte juridique n'est qu'une étape. Le démembrement ne prend effet vis-à-vis de la SCPI qu'après une formalité essentielle. Voici les étapes à suivre :
-
Notification : l'acte de démembrement (ou un extrait) doit impérativement être notifié à la société de gestion dans les formes prévues par les statuts (souvent par lettre recommandée avec accusé de réception).
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Mise à jour du registre : sur la base de cette notification, la société de gestion met à jour son registre des associés. Ce registre mentionnera clairement la personne détenant l'usufruit (qui recevra les revenus et les convocations pour les votes sur l'affectation du résultat) et la personne détenant la nue-propriété (qui votera sur les décisions affectant le capital).
-
Date d'effet : la date d'effet du démembrement est celle de la mise à jour du registre des associés de la SCPI.
Les conséquences fiscales du démembrement sur les associés
Le démembrement modifie radicalement le régime fiscal de l'investissement, impactant à la fois l'impôt sur le patrimoine (IFI) et l'impôt sur les revenus.
Fiscalité du nu-propriétaire : IFI et fiscalité des plus-values latentes
Le nu-propriétaire, bien qu'il détienne la valeur du capital, bénéficie d'une fiscalité allégée pendant la durée du démembrement.
IFI allégé ou exonéré
En cas de démembrement viager (donation), l'IFI porte uniquement sur la valeur de l'usufruit (déclaré par l'usufruitier). Le nu-propriétaire n'a rien à déclarer au titre de l'IFI pour cette nue-propriété.
En revanche, quand il s'agit de démembrement temporaire (achat), l'usufruitier et le nu-propriétaire sont imposés chacun sur la valeur de leur droit respectif, selon la clé de répartition économique. Cela permet de réduire la valeur totale à déclarer par chacun.
Plus-values latentes
Le nu-propriétaire ne perçoit aucun revenu sur la durée. S'il vend sa nue-propriété avant la réunification, il sera imposé sur la plus-value réalisée, calculée en tenant compte de la valeur de la nue-propriété au moment de l'acquisition (la donation ou l'achat).
Fiscalité de l'usufruitier : imposition des revenus fonciers
L'usufruitier est la personne qui supporte l'impôt sur le rendement locatif. Il est imposé sur les revenus fonciers (loyers) distribués par la SCPI. Voici ce que cela implique :
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Personne physique : ces revenus sont ajoutés aux autres revenus et soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu (IR) ainsi qu'aux prélèvements sociaux (17,2 %).
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Société à l'IS : Les revenus sont intégrés au résultat fiscal de l'entreprise et imposés à l'IS, mais l'entreprise peut déduire l'amortissement de l'usufruit (dans le cas d'un usufruit acheté), ce qui minimise l'impôt effectif.
Gérer la vie des parts démembrées jusqu'à la réunification
Une fois le démembrement établi, la société de gestion doit s'assurer que les règles de gestion et de répartition des charges sont respectées conformément aux statuts.
La répartition des charges et des droits de vote selon les statuts
Les statuts de la SCPI sont le document de référence pour gérer la vie des parts démembrées. Ils précisent qui des deux associés doit supporter les appels de fonds exceptionnels. Par principe, le nu-propriétaire supporte les grosses réparations (qui conservent le capital), tandis que l'usufruitier supporte les frais courants d'entretien (qui permettent la jouissance). Dans la pratique de la SCPI, les frais courants sont souvent prélevés avant distribution des revenus.
En matière de droits de vote, l'usufruitier vote sur l'affectation des résultats (distribution des revenus). Le nu-propriétaire, quant à lui, vote sur les décisions affectant le capital (modification des statuts, augmentation de capital, vente d'immeubles générant des plus-values).
La reconstitution automatique de la pleine propriété au terme de l'usufruit
C'est l'étape finale du démembrement, que la société de gestion exécute d'office. Le démembrement prend fin soit au décès de l'usufruitier (viager), soit à la date contractuellement prévue (temporaire). À cette date, la nue-propriété et l'usufruit se rejoignent automatiquement et sans formalité. Le nu-propriétaire devient plein propriétaire des parts.
Cette réunification est neutre fiscalement : il n'y a ni droits d'enregistrement ni impôt sur la plus-value (l'article 150-0 B du CGI prévoit que le prix d'acquisition à retenir pour une cession ultérieure des parts par le nu-propriétaire est le prix d'acquisition total initial des parts par le donateur ou le vendeur, sans tenir compte de la valeur de l'usufruit qui s'est éteint).
La société de gestion met simplement à jour son registre des associés pour que le nu-propriétaire, désormais plein propriétaire, commence à percevoir les revenus de la SCPI.
Démembrement de SCPI : une solution pour gérer l'IFI
Le démembrement de parts de SCPI est une stratégie patrimoniale puissante qui permet de répondre à des objectifs fiscaux et successoraux tout en optimisant la gestion des investissements immobiliers. Cependant, il requiert une analyse approfondie et un accompagnement juridique pour garantir son succès. Chaque étape, de la consultation des statuts de la SCPI à la gestion des formalités administratives, doit être soigneusement préparée pour maximiser les bénéfices fiscaux et successoraux.
Prêt à démembrez vos parts de SCPI ? Contactez nos experts pour être guidé à chaque étape et optimiser votre patrimoine.
FAQ : 1. Quel est le coût d'un démembrement de parts de SCPI ?
Le coût d'un démembrement dépend des frais juridiques, notariaux et administratifs. Il est conseillé de prévoir un budget pour les honoraires du notaire et les frais de mise à jour du registre de la SCPI.
2. Peut-on démembrer ses parts de SCPI en cas de démembrement déjà existant ?
Oui, il est possible de démembrer de nouveau des parts de SCPI, mais cela nécessite une évaluation attentive de la situation patrimoniale et une consultation des statuts de la SCPI pour vérifier la faisabilité.
3. Quelles sont les conséquences fiscales si je vends ma nue-propriété avant la réunification des parts de SCPI ?
La vente de la nue-propriété avant la réunification entraîne une imposition sur la plus-value réalisée, calculée selon la valeur de la nue-propriété au moment de l’acquisition.
4. Le démembrement de parts de SCPI est-il adapté aux investisseurs étrangers ?
Oui, le démembrement peut être utilisé par des investisseurs étrangers, mais il est important de vérifier les spécificités fiscales du pays d’origine et de consulter un expert en fiscalité internationale.
5. Est-il possible de réintégrer l'usufruit après une cession temporaire de SCPI ?
Non, une fois que l'usufruit est cédé dans le cadre d’un démembrement temporaire, il ne peut pas être réintégré avant la fin de la période déterminée. La réunification se fait uniquement à la fin du contrat ou au décès de l'usufruitier dans le cas d'un démembrement viager.
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